Mais qui était donc Jean Cézard?

C'est dans une de ces maisons, au bord de la route départementale, qu' est né Jean Cézard en 1924...

Jean Emile CÉZARD est né à MEMBREY au lieu-dit "En Callot" le 23 mars à 8 heures, au matin du premier dimanche du printemps de 1924.

Son père, Constant Ernest Lucien CÉZARD, né le 16 septembre 1897 à 5 km de là, précisément à Lavoncourt (70) exerce la profession de cordonnier. Son commerce est installé à Dampierre-sur-Salon.

Sa mère, Louis Emilienne Marguerite CARIOT, née le 28 septembre 1901 à Fouvent-le-Haut (70), à 9 km est sans profession.

Jean Emile se marie le 8 novembre 1947, à 23 ans, avec Jacqueline LASSERRE à Dampierre-Sur-Salon (70) à 6 km de son domicile de naissance.

Il décèdera le 8 avril 1977 à Gassin, dans le Var, sur les hauteurs de Saint-Tropez à l'âge de 53 ans.

Mais qui était vraiment Jean CÉZARD ? 

La cordonnerie de Constant Cézard à Dampierre-sur-Salon vers 1928-29. A droite, le petit Jean doit avoir 4 ou 5 ans et sa soeur Marie Louise deux ans et demi de plus!

D'abord... rendons à Cézard ce qui appartient à César! (je sais, c'est facile mais je n'ai pas pu résister)

Le texte qui va suivre est une notice biographique réalisée à partir des documents rédigés par Gérard Thomassian de la bouquinerie Fantasmak, Fabrice Castanet et Dominik Vallet  tous trois grands spécialistes de l'histoire de la bande dessinée à l'exceptionnelle érudition. Je les remercie vivement.

Je remercie également les Editions TOTH, Thierry Robin et François Corteggiani pour leur soutien.

Je souhaite que les lecteurs qui sont susceptibles d'apporter des informations sur la vie et l'oeuvre de Jean Cézard prennent contact avec moi, ils en sont d'avance remerciés.

Jean Cézard fut l'un des auteurs les plus prolifiques de la bande dessinée française de l'après- guerre. 

On dit qu'à 16 ans, en 1940, déjà passionné par le dessin, il réalise, sans la publier, une version B.D. de Zorro, infatigable combattant des injustices, héros célèbre à l'époque et qui était depuis sa création en 1919, l'objet de nombreuses éditions et de fréquentes adaptations au cinéma.

Vers 20 ans, entre 1944 et 1946, Jean Cézard commence à placer quelques dessins humoristiques dans la presse et en 1946, il contacte des éditeurs de journaux d'enfants et entre dans le monde de la Bande Dessinée.

Il travaille en particulier pour le bimensuel Francs-Jeux édité par la ligue de l'enseignement pour lequel, à partir de 1948, il réalise une série comique : "Monsieur Toudou".

Sa riche et intense carrière est lancée.

Monsieur Toudou, gentil héros du quotidien accompagné du singe gaffeur Toulour!

Mais parlons du contexte éditorial des premières années de l'après-guerre.

L'édition de périodiques pour la jeunesse est un enjeu économique et culturel important. Outre un certain nombre d'éditions privées de moindre importance, les grands journaux pour enfants et adolescents ont été créés avant la guerre par des organisations liées à la religion catholique.

En 1929, naît "Coeurs Vaillants" créé par l'Union des Oeuvres Catholiques de France (UOCF). C'est le plus lu des périodiques pour la jeunesse et il édite en particulier les oeuvres de Hergé.  Tintin au pays des soviets" est la première bande dessinée éditée de manière hebdomadaire et le parti pris idéologique est clair. Le magazine coeurs Vaillants sera complété en 1937 (jusqu'en 1963) par un journal destiné aux filles : “Ames Vaillantes”.

En 1936, les éditions "la Maison de la Bonne Presse" devenues "Bayard Presse" puis le "Groupe Bayard", créées dès 1873 et appartenant à la congrégation religieuse catholique des Augustins de l'Assomption, lancent le périodique "Bayard" gardien de l'ordre moral, très impliqué en religion et au discours très rigoriste. Aujourd'hui, le groupe "Bayard Presse" est l'éditeur de nombreux titres pour adultes: La Croix, Le Pélerin, Marie France, mais reste aussi très présent dans la presse pour jeunes: Pomme d'Api, J'aime lire, Okapi, etc...

Dès la guerre terminée, le Parti Communiste Français, déja propriétaire de "L'Humanité" décide de se lancer dans la bataille éditoriale pour la jeunesse afin ne pas laisser le champs libre à la presse catholique. 

En 1945, il décide de créer un groupe de presse et de lancer le périodique "Vaillant", en concurrence directe au journal "Coeurs Vaillants". Le nouveau titre sera dirigé par une ancienne institutrice et résistante communiste: Madeleine Bellet.

On y découvre des bandes dessinées telles que "Placid et Muzo" et surtout "Pif le Chien" petit animal anthropomorphe créé par José Cabrero Arnal et qui était déjà présent dans les colonnes de l'Humanité.

Pif le chien et son ami le chat Hercule

Après de nombreuses vicissitudes, en 1969, "Vaillant" devient "Pif Gadget" et connaît quelques années fastes grâce à quelques excellents coups de pub comme les célèbres "pois sauteurs" restés dans toutes les mémoires avant de disparaître puis de renaître dans une sorte d'agonie sans fin.

Le blog "Vaillant et Pif Gadget" rend un hommage nostalgique à la période faste de ces publications. 

La lutte éditoriale entre les titres de la presse pour jeunes a entrainé un intense bouillonnement créatif, l'éclosion de nombreux talents et la naissance d'une véritable école française des dessinateurs et scénaristes de la bande dessinée.

A la même époque, le marché évolue et les périodiques se mettent à éditer les planches hebdomadaires sous la forme des albums cartonnés, souvent assez luxueux, que nous connaissons aujourd'hui ou, au contraire, de "petits formats" de poche, réalisés à l'économie et destinés à être lus rapidement.

Jean Cézard, tout sourire ci-dessous, fût l'un des acteurs importants de cette période faste. Dès 1948, il collabore au journal Vaillant puis à Pif Gadget et ne cesse plus de produire jusqu'au dernier jour.

Il est décrit comme un bourreau de travail, il publie sans cesse de nombreuses planches dessinées aussi bien dans le genre réaliste que dans le genre comique.

Il crée de nombreux héros, "KiWi"," Arthur le fantôme justicier", "les rigolus et les tristus", "Surplouf le petit corsaire" pour ne citer que ceux-là. Mais, par-dessus tout, il reste fidèle aux valeurs de justice sociale et de tolérance qui sont les siennes depuis toujours.

Arthur, son plus grand succès, est un petit fantôme qui se déplace dans l'espace-temps pour imposer partout et toujours les valeurs de justice et de paix.

Les rigolus et les tristus peuplent une planète verte et rouge, s'opposent en recrutant de nouveaux membres par le rire pour les uns et les larmes pour les autres dans une société aux luttes caricaturales.

Une planche d'Arthur le fantôme justicier

Une autre planche

Et pour terminer, je laisse volontiers la plume à Gérard Thomassian :

"Cézard ne fréquentait guère les manifestations de bandes dessinées, il se consacrait entièrement à son travail, dessinant tous les soirs jusqu'à minuit, ne s'octroyant aucunes vacances. S'adressant à un public vaste et jeune, il fut longtemps délaissé par la critique spécialisée. Mais son talent commence à être reconnu. Et un jour, sans doute, deviendra-t-il un dessinateur culte".

Comment mieux illustrer le propos que par le cri de joie de Surplouf le petit corsaire!

Et pour tout savoir sur l'oeuvre graphique et la vie professionnelle de Jean Cézard:

Visitez le site de la Bédéthèque ou consultez l'excellente biographie rédigée par Gérard Thomassian pour les éditions Toth.